tu m'as réveiller juste pour voir ma tronche ? → little bro'

5h37. Putain. Tu te moques de moi. Ce foutu cadran devait délirer. Ce n’était pas possible. Depuis quelques jours, c’était la même routine. Je n’arrivais pas à fermer l’œil. J’émergeais de mon sommeil presque aussitôt m’être endormi. Foutue insomnie. J’avais gravement besoin de sommeil. Mes nuits étaient saccadées. Très inconfortable. Impossible de fermer l’œil plus d’une heure sans me réveiller en sueur pour aucun raison. Pour la troisième nuit consécutive, je fixais le plafond et un long et profond soupir se fit entendre dans toute la pièce. Ce que je pouvais détester ne pas fermer l’œil de la nuit. Un vrai cauchemar.

Je me résolu à sortir du lit. Non pas sans peine et misère. Direction la salle de bain. Je fixais le reflet que me renvoyais le miroir. J’avais une mine affreuse. J’étais peine de constater que la réflexion que me renvoyais la glace n’était nul autre que moi. Ces boursouflures sous mes yeux de couleur violine ne m’avantageaient guère. J’aspergeais mon visage d’eau fraiche - histoire de me réveiller un peu. J’attrapais une veste et sortit me rafraîchir les idées. Les rues étaient désertes. L’air dégageait un parfum nacré. Hanson Bay dormait encore. Les oiseaux, perchés sur des branches, m’accueillaient de leurs chants matinaux. Je sortis mon téléphone de ma poche et me mit à envoyer des sms à Ryan.

« Dans une demi-heure au café de Juliet ? ». M’enquis-je. « Je te retrouve sur le port. » dit simplement Ryan. Alors je ne renchéris pas. Sachant très bien que Ryan était toujours très catégorique dans ses propos. J’adorais traîner au café de Juliet. D’ailleurs, j’y étais très régulièrement à croire que j’y avais pris un abonnement. Je passais tout de même chercher deux cafés au Riddle’s café. J’avais dans l’idée que j’avais Ryan du lit alors je lui devais bien ça. Comme prévu je me rendis sur le quai tenant les cafés dans une main ainsi qu’un paquet rempli de brioches, croissant et beignets dans l’autre. Je me postais près du quai, assis paisiblement, à fixer les bateaux voguer. « Merci frangin ! ». Je détournais le regard, je n’avais pas entendu ses pas. J’attrapais le dernier café et le posa à mes lèvres. . « Alors pourquoi tu me tire du lit aussi tôt ? ». Je fis mine de réfléchir. « Pour être honnête, je n’arrive pas à dormir et j’avais besoin d’un peu de compagnie. Qui plus est, j’avais envie de te voir, ça fait un bail qu’on ne s’est pas vus ».

« Oui mais moi je dormais bien. » rétorqua Ryan, amusé. J'arquais un sourcil, dubitatif. Il était loin d'être à plaindre le pauvre. Il jonglait avec deux filles à la fois, et c'était moi l'enquiquineur de service. Et tout ça seulement pour l'avoir réveiller à l'aurore. Non, mais. Il n'avait qu'à moins faire la fête et briser des coeurs et le tour serait joué. « T'as qu'à moins t'envoyer en l'air et t'auras moins sommeil, frangin » suite de quoi, je lui décochais un clin d'oeil. J'aurais bien put ajouter un sous-entendu du fait que j'étais au courant qu'il butinait plus d'une fleur à la fois, mais je préférais taire cette information, pour tout de suite. Ainsi, je conservais plus d'un atout dans ma manche. Mon approche était simple, faire mariner un peu Ryan et tâter le terrain. Ainsi j'allais voir s'il allait me déballer toute l'histoire ou bien ne rien me dire. Autant tout m'avouer puisque je savais déjà tout, plus que je ne le laissais croire et plus que ce que lui même savait. « Je te manquais à ce point-là ? » dit-il accompagné d'un rire que je connaissais si bien et qui voulait en gros dire qu'il me narguait. Ce à quoi je répliquais un ton moqueur « tu sais bien que je suis incapable de me passer de toi mon bichon » rétorquais-je en lui pincant la joue comme le faisais nos grand-mères. Histoire de lui rendre la monnaie de sa pièce. « Non sérieusement, qu’est-ce qui t’empêche de dormir ? » puis, il enchaîna « c’est une femme qui te fait tourner la tête ? ». Il avait touché une corde sensible. En effet, mais pas n'importe quelle femme. Juliet, sa Juliet. « Ouais, en quelque sorte, en fait je voulais surtout discuter de tout et de rien ... »

Je devais avouer que j’avais poussé la note. C’était un peu trop exagéré. La fatigue avait eu raison de moi. Mon seuil de tolérance et d’endurance était assez bas. Quasi nul, même. J’en devenais désagréable, impossible à vivre, je faisais des blagues déplacés voir même graves. C’était nul, archi nul, je sais. Je devais me ressaisir bon sang. Ryan n’y était pour rien si je n’arrivais pas à trouver le sommeil depuis quelques jours, mais ça devenait plus fort que moi. La carence de sommeil prenait le dessus et je ne pouvais pas le contrôler. Le manque de sommeil avait vraiment des répercussions dans plusieurs aspects de ma vie. Même au boulot, j’étais merdique, lunatique, maladroit. Et je ne pouvais pas me le permettre. Enfin, c’était du sérieux. Mais j’avais essayé tous les remèdes pour tenter de corriger la situation. Un verre de lait chaud et du miel, une tisane, faire de l’exercice physique pour m’épuiser, prendre des marches, faire le vide de mon esprit. Rien n’y faisait. J’étais en train de devenir complètement barjo. Fou. L’insomnie me rendait malade. Je haussais les épaules. « Je peux savoir ce qui t’arrive ? », je frottais mon visage avec mes mains pour essayer de me ressaisir et bu quelques gorgées de mon café encore brûlant. « Désolé frangin, cette putain d’insomnie va finir par avoir raison de moi » dis-je simplement sur un ton exaspéré. Ryan n’était pas suceptible, enfin pas tant, et j’avais de la chance. « Crache le morceau Ezra, qu’est-ce qui te tracasse à ce point-là ? » me demanda-t-il alors avant d’ajouter : « Roh fait pas le surpris, hein, je vois bien que tu me cache un truc. » « Ouais, ça me tue ce truc, je vais devenir complètement fou »

« Va falloir que je te fasse un véritable interrogatoire pour que tu m’en dise plus ? » Ryan tentait de me faire cracher le morceau alors que je tentais de sauver du temps. Voir même m’extirper les vers du nez. La situation était au comble du ridicule. Enfin, c’était moi qui l’avais appelé pour lui avouer un truc et maintenant je me dégonflais. Comme un nul. En fait, pour être honnête, j’étais plus envahi de remords de tout avouer à mon frangin. Techniquement, l’histoire ne me concernait pas directement et je n’avais pas à me mettre entre eux. J’allais probablement provoquer de la bisbille entre Ryan et Juliet, mais d’un autre côté si je ne l’avouais pas à mon frère, il risquait de vouloir m’arracher la tête. Littéralement. Je savais qu’il en était capable. Et même, je le savais en mesure d’être en colère après moi seulement parce que Juliet me l’a avoué avant lui et que je ne lui aurais pas déballé l’histoire.

« Il arrive un truc à maman ? » dit-il du tac au tac. Je connaissais Ryan comme le fond de ma poche. Je savais très bien comment il fonctionnait. Si je ne voulais pas avouer, il allait procéder par élimination et finir par obtenir ce qu’il voulait. « Non, maman va très bien, d’ailleurs depuis qu’elle a rencontré ce prof de pilates, elle flotte sur un nuage, à croire que manger des yaourt à la mangue et avoir un fessier d’acier, c’est la meilleure chose qu’il ne lui soit pas arrivé depuis des lustres » dis-je sur un ton humoristique. Je n’avais jamais été réellement proche de ma mère. Enfin pas au point de lui raconter tous mes moindres secrets. Or, la famille pour moi, ça comptait énormément. C’était sacré. Probablement la chose que j’avais de plus précieux au monde.

« Juliet t’as parlé de quelque chose ? » Touché. Coulé. Il avait fini par trouver. Et il avait mis le doigt pile dessus. J’avalais ma gorgée de café de travers et manquais de m’étouffer. « Si elle a une galère tu dois me le dire frangin ! » Je m’étais mis dans le pétrin, c’est bien vrai. Après tout, c’est moi qui l’avais sorti du lit pour l’amener ici. Mais je ne pouvais pas non plus, lui cracher au visage alors que je m’étais mis les pieds dans les plats. Bien que je ne puisse pas dénoncer Juliet non plus, je devais être fair-play. Je n’allais pas lui avouer mot pour mot, mais j’allais faire de fortes allusions. J’ouvris alors la bouche et tout ce que j’eus le temps de prononcer fut « Ouais t’as raison, elle …. » pile à ce moment-là un homme bedonnant tombe de son vélo et dans la mêlée, il nous bouscule Ryan et moi et renverse nos cafés droit sur nos cuisses. C’est alors que je poussais un hurlement de douleur. Le café était brûlant. Très inconfortable. Mes pantalons étaient humides et empestait le café. Génial. Vraiment, j’aurais dût rester couché ce matin.