(F/RESERVEE) ROSIE TUPPER

juillet deux mile onze. Je grimpais les marches, et frappais à la porte des Cullighan. Eden, je savais qu'elle devait probablement se trouver chez elle et profitais donc de cette occasion pour lui donner en personne son courrier. Elle me cria d'entrer, chose que je fis. Ne me dis pas que tu as frappé pour me donner le courrier de mes parents ! râla-t-elle. C'est pour toi lui dis-je tout en lui tendant sa lettre, je déposais le reste sur l'étrangère trônant dans l'entrée. Eden, s'empressa d'ouvrir sa lettre. Tu as réussi tes examens ? lui demandais-je. Elle était dans la même classe que ma soeur depuis la petite enfance, je connaissais donc relativement bien son emploi du temps ainsi que son parcours scolaire étant donné que je me suis toujours intéressé à ce que ma soeur pouvait faire. Un silence, pesant, et lourd, envahissait la pièce. Je fronçais les sourcils et reposais mon attention sur elle, clairement choquée par ce qu'elle possédait entre les doigts. Dégages Gabriel, dégages me cria-t-elle avant de balancer violemment sa lettre contre le mur. Sa colère m'étonnait, je ne comprenais pas cette réaction, ni même ce qui l'avait provoqué. J'aimais comprendre, aider, ainsi que me rendre utile. Je ne veux plus de toi ! Tu dégages, et tu ne reviens plus ! Maintenant, tu fais comme tout le monde, t'utilises notre putain de boîte aux lettres et tu dis à ta soeur de venir me rejoindre rapidement continua-t-elle de crier tout en me poussant vers la sortie. Eden ... qu'est-ce qui se passe ? marmonnais-je, surpris, et quelque peu paniqué. Elle explosa en larmes, et frappa mon torse. Qu'est-ce que tu ne comprends pas dans ma demande ? Tu dégages Gabriel, je ne veux plus de toi ici putain continua-t-elle avant de me gifler. Je la savais impulsive, Louise m'avait fait part de ce trait de sa personnalité, mais je ne pensais pas que cela conservait également la violence. Elle comprit tout de suite son erreur, et me regarda, gênée. Ses larmes glissaient le long de son visage, et je ne tardais plus afin de quitter la maison. La porte se ferma sur mon corps, et je restais là, figé.

novembre deux mile onze. Je ne l'avais pas vu depuis ce jour-là, en juillet. Louise ne m'en parlait pas. Je ne lui posais pas pour autant de questions, je ne le voulais pas, et ne cherchais étrangement pas à obtenir des réponses. Je grimpais les marches, et sortais le courrier que je devais déposer au sein de la maison des Cullighan. Je tombais alors nez-à-nez face à elle, son visage, vide d'expression, me fit comprendre qu'elle ne s'était toujours pas remise de cette journée. Pourquoi ? Je l'ai toujours connu souriante, cela m'énervait de la savoir malheureuse, m'agaçait, me perturbait ; j'avais pris l'habitude de déposer le courrier à une jeune femme pleine de joie. J'enfonçais mes doigts dans mes cheveux, et lui tendais le colis qui lui était adressé. Eden signa, et s'apprêta à me fermer la porte au nez. Eden, s'il te plait ! soufflais-je tout en bloquant cette même porte avec mon pied. Expliques-moi, laisses-moi t'aider ajoutais-je, doucement. Je savais que me comporter brusquement risquait de la blesser, et c'était tout sauf mon intention. Elle me regarda, je voyais des larmes noyer son regard. Putain, ce que je me sentais alors con en cet instant. Je faisais tomber mon sac contre le sol, et attrapais ses mains. Elles étaient tremblantes, son corps également. Qu'est-ce qu'il t'arrive Eden ? lui demandais-je, réellement inquiet. Elle se perdait, s'éloignait de moi, de nous, et de notre réalité, jusqu'à finir par tomber dans mes bras. Mon coeur était à deux doigts d'exploser, j'étais tétanisé. Elle, l'amie de ma soeur, était sous ma protection, et la voir s'échouer ainsi contre mon corps me faisait peur. Je lui frappais doucement le visage, jusqu'à finir par la voir rouvrir les yeux, d'un coup. Elle toussa, et glissa ses bras, faibles, autour de ma taille. Tu peux compter sur moi murmurais-je, avant de caresser le bas de son dos. Je comprenais qu'elle était seule, perdue, et qu'elle avait besoin d'une présence, autre que celle de ma soeur.

juin deux mile douze. Je roulais, vite, j'aimais la fin d'une tournée, et le plaisir de dévaler cette longue pente avant de retourner au centre de tri. Je m'arrêtais, à un feu rouge, et plaquais mes pieds au sol. Je jouais déjà, afin de patienter, avec mes lèvres. Le temps m'offrait une pause, et mon esprit se laissait envahir par l'image de cette jeune femme. Je m'en voulais déjà de lui accorder mes pensées. J'avais simplement envie de retourner auprès d'elle, et de glisser mes bras sur sa fine taille, de la rassurer, et de l'entendre me dire que j'étais un homme bon, et doux. Je souriais, niaisement, et secouait mon visage avant de redémarrer. Je pédalais, vite. Putain, j'en pouvais plus de ces sentiments à la con, et totalement inutiles. Pourquoi elle, moi, pourquoi nous ? J'avais envie de souffler, et de me libérer de ce sentiment aussi agréable que dévastateur.